Depuis les années 70 une nouvelle discipline scientifique fait beaucoup parler d’elle: il s’agit de « l’ethnobotanique ». Ne cherchez pas dans votre dictionnaire, ce mot n’y figure même pas! Grossièrement on peut dire que l’ethnobotanique est l’ étude de l’homme par rapport aux plantes psychotropes. Les pionniers les plus célèbres en sont les Pr Roger Heim et Wasson pour leurs études sur les champignons, le Pr Albert Hoffman (le LSD et la psilocybine c’était déjà lui) et le Prof Shultès qui ont écrit ensemble ce que certains considèrent comme l’ouvrage fondateur de l’ethnobotanique, Les Plantes des Dieux (Ed du Lezard). Ajoutons pour être complet le Dr Heffter réputé pour ses études sur le peyotl et plus récemment Christian Rätsch auteur d’une formidable encyclopédie des plantes psychoactives (disponible en langue allemande ou anglaise seulement).
Parmi ces nouvelles vieilles “plantes à drogue” , il y’en a une qui s’est imposée particulièrement dans le petit monde des fumeurs de cannabis et autres psychonautes : la Salvia Divinorum ou Sauge des Devins . Légale et relativement facile à acquérir (parfois vendu comme encens), la Salvia a fait son trou dans la gamme des drogues psychédéliques.
A l’origine cette plante ne pousse que dans la région de l’Oaxacan au sud du Mexique. Selon les botanistes elle est devenue mystérieusement stérile il y’ a plus d’un millier d’années. Elle ne survit (survivait) donc que du fait de l’homme, par bouturage. Mais, tout aussi mystérieusement, certains spécimens cultivés sur Hawaï se remettent aujourd’hui à produire des graines….
Il y a déjà bien longtemps son usage faisait partie des rites religieux des shamans mazatèques leur offrant des visions donnant le pouvoir de guérir. En 1962 les Prof Albert Hoffman et Wasson découvrirent à l’occasion d’une expédition au Mexique la salvia divinorum et assistèrent à des rituels de guérisons avec la salvia. Ils en ramèneront quelques boutures dont sont encore issus la plupart des plantes cultivées dans le monde occidental.
La Salvia divinorum est une plante vivace qui peut mesurer jusqu’à 1.5 m, ses feuilles sont ovales et légèrement dentelées. Elle est la seule variété de sauge à avoir des propriétés psychoactives. Quand la plante atteint à peu près 50 cm, des fleurs blanches apparaissent, qui deviennent bleues quand la plante prend de l’âge. Aujourd’hui, grâce au bouturage la plante s’est diffusée bien au delà du Mexique. Il est possible de la cultiver sous nos latitudes, mais en pot pour leur faire passer l’hiver au chaud. La plante est parait-il très facile à entretenir et décorera bien votre intérieur (en attendant de s’occuper de vos neurones). Une courte recherche sur le net vous fera trouver sans aucun doute soit des boutures soit des plants déjà enracinés pour une vingtaine d’euros.
La salvia peut se consommer de différentes façons: on peut en fumer les feuilles séchées ou fraîches (pour un trip plus progressif), on peut également mâcher aussi des feuilles fraîches mais il en faut bien plus (entre 15 et 20 feuilles contre 2 feuilles séchées en fumant). Et puis il y’a les fameux extraits (x5, x10, x15 et même x20). Cela signifie qu’ un gramme de x20 est égal à 20 grammes de saliva normale”. Mieux vaut ne pas se tromper dans les dosages…. Certains aiment à combiner les différents modes de conso: on commence par chiquer des feuilles fraîches, puis des séchées et les plus avertis (ou inconscients?) se finissent aux extraits. Un site propose désormais de l’extrait de salvia liquide à usagesublingual, redoutable parait-il… La vaporisation (technique différent des vaporiseurs pour cannabis) est peut-être la méthode la plus violente pour user de la salvia. et reste réservée aux utilisateurs expérimentés. La méthode la plus simple reste de fumer les feuilles ou de l’extrait en joint, cela permet aussi d’ajuster progressivement le niveau de défonce qui vous convient. Pour fumer la salvia il est préférable d’utiliser un briquet de type “chalumeau”, la salvia ayant besoin de fortes températures pour se consumer. Les personnes psychologiquement fragiles ne devraient jamais tenter cette expérience, les sensations de dissociations (entre autres) pouvant rapidement leur devenir insupportables Et puis surtout ne jamais conduire sous influence de la Salvia, c’est la gamelle quasi garantie.
Les effets
Bizarres, étrange sont souvent les premiers sentiments qu’une personne exprime après avoir fait une expérience à la salvia.
Mettons les choses au point tout de suite, la salvia n’est pas une drogue pour faire la teuf et n’est pas non plus une drogue “sociable” .Bien que cette plante ne soit ni toxique ni addictive et relativement sûre d’utilisation (pas d’overdose mortelle connue à ce jour) un trip à la salvia est un étrange et puissant voyage introspectif et comme avec n’importe quel hallucinogène il peut également se révéler très pénible (attention aux bad trips!). L’expérience se fait de préférence dans l’obscurité, voir le noir total (certains usagers se bandent les yeux) et assis car vous risquez de tomber durant le trip. Evitez de laisser traîner des objet pouvant blesser et assurez vous qu’une personne reste claire, ça peut servir ! Les effets ne durent guère plus d’une demi-heure, ce qui déjà est rassurant en cas de mauvais trip. L’idéal serait de faire cette expérience accompagné d’un usager expérimenté. Daniel Sielbert, grand spécialiste de la salvia (et du “kratom” une plante au potentiel étonnant – sorte de speedball végétal- dont on vous causera plus tard) définit lui la salvia comme étant un “enchantogène” plutôt qu’entheogène. Mais attention, cette description des effets fait l’impasse sur ce qui peut être ressenti en cas de mauvais trip… Dans l’entourage d’Asud certains on fait l’ expérience , morceaux choisis: une copine a carrément vu” Dieu en face” et a adoré cette initiation faite dans de parfaites conditions, lieu choisi, produits de qualité, avec des amis et un “guide” pour encadrer l’affaire. Un autre nous a raconté comment il s’est retrouvé “entre le mur et le papier peint”… Il y’a beaucoup de témoignage de dissociation genre je ne suis pas assis sur un lit je suis le lit ou “je vois un tableau vivant, c’est celui de ma vie , elle ne m’appartenait plus, j’en étais le spectateur”. Un autre nous explique qu’il a vu sa table en bois se liquéfier ainsi que son bang posé dessus: de la table coulait du bois liquide et du bang du verre liquide. Il peut arriver de plus pouvoir parler, impossible de sortir un son de sa bouche mais ça c’est moins rigolo. Personnellement j’ai fais l’expérience une fois, seul chez moi avec une dose assez faible. Ca n’a pas été agréable du tout: je me sentais écrasé sur mon lit sans pouvoir bouger, tout me semblait étrange, puis menaçant. Les arbres que je voyais de ma fenêtre semblaient se rapprocher, s’épaissir, formant une masse mouvante pas sympathique du tout. Heureusement l’effet est court mais je suis resté avec un sentiment de malaise les deux heures qui ont suivi.
La salvia est encore légale en France mais déjà prohibée en Australie et les USA cherchent un prétexte pour suivre, on peut donc facilement imaginer que la France suivra, la seule question, c’est quand? A savoir aussi que la salvinorine A est un agoniste des opiacés, ce qui par ailleurs intéresse beaucoup les chercheurs.
Il semble donc que cette plante n’a pas fini de nous surprendre… si vous décidez de tenter un trip à la Salvia, je vous recommande très vivement de lire “ le guide d’utilisation de la salvia divinorum” disponible gratuitement et en français sur www.sagewisdom.org un site extrêmement complet (usages, histoire, effets, témoignages, FAQ, culture, etc..) dédié à cette plante magique et si mystérieuse.