Précisions : nous n’avons pas mis cette article pour faire de la pub pour une méthode miracle, mais pour faire réfléchir sur les sevrages en France (en particulier des produits de substitution) qui sont souvent mal faits. Pour faire le pendant de ce sevrage réussi, nous avons mis dans les commentaires deux témoignages de personnes qui ont suivi la cure et qui ont rencontré l’échec, voire qui ont été confrontées à de plus grandes difficultés par la suite . Rappelons également que la méthode UROD est un service médical privé qui propose ses services contre rémunération.
L’équipe d’Asud
Ce n’est pas un nouveau cépage palestinien ni un jeu de mot de mauvais goût sur la violence des territoires mais le compte-rendu, pour les besoins de ce dossier spécial « neurosciences des accros et marché de la détox », d’une épopée israélienne en gonzo journaliste, très à cheval… sur la vérification des sources !!!!
J’ai repris le cheval !! Après un an de quasi abstinence qui avait suivi une longue et assidue carrière d’usager à dosages pachydermiques. J’avais pourtant réussi une décro de Marmotte maso (de 180 mg de métha) et une postcure au fond d’un trou sans fin qui m’avait fait jurer « plus jamais ça ». Mais à trop me laisser la bride sur le cou, le cheval m’a repris comme en 14, au dur front des tranchées urbaines. En 3 semaines, avec ma bouteille et mon côté « il en reste ? », j’en suis déjà à 3 g/jour : ½ pour le dragon du matin qui permet d’atteindre la cafetière, un autre ½ pour atteindre la coupure de midi, ½ pour redémarrer l’aprèm dans de bonnes conditions, 1/4 pour le petit 4 heures… sans compter le demi de CC mini qu’il faut pour boucler la journée sans piquer du zen devant les collègues !! Au secours le budget… après 50 millions de consommateurs, voici les consommations à 50 millions. Tout ça, juste pour fonctionner !!
Les 3 semaines de vacances qui s’annoncent sont l’occasion de mettre un point final à ce n’importe quoi. Je ne vois que 3 solutions : Chez moi, avec un sac poubelle de médocs triés sur le Vidal et une allaise en latex ! La Teuf ! Bordé à Marmottan (souvenirs, souvenirs…) ou enfin, un Easy Jet pour le soleil et le bungalow les pieds dans l’eau… De loin la solution la plus tentante, mais les pays qui sont si chauds sont aussi souvent sous le soleil de la substance. Risqué car comme la chair sa voisine, la veine est faible. Le souvenir de 4 ans sous méthadone me fait écarter d’emblée le confort de la solution substitution dont la porte de sortie est un foutu dédale.
La double promesse
Dans ce vaste monde de la toxicomanie, je tombe comme par un hasard bien fait sur une précédente issue de la prestigieuse publication que vous tenez entre les mains et son article concernant le professeur Waismann et sa clinique de détox en Israël. Un petit tour sur le site de l’anachorète et son ANR Clinic, et de décrocher mon téléphone (c’est un début) afin d’en savoir plus sur la méthode et les modalités. C‘est Tamie, parlant un parfait gaulois, qui me met au parfum, et me donne le portable de plusieurs patients français passés entre les mains du Doc. Et de me laisser sur la double promesse : décrocher sous anesthésie générale en quelques heures sans douleurs, et ensuite un traitement qui me ramène à un état neurologique antérieur à ma 1ère addiction !!! Sans dec !? La perspective de m’éviter la terrible déprime post-décro me rallume la lumière dans toutes les pièces (la dernière descente pour quitter des années de métha à dose d’éléphant dura un an).
Coup de bigot aux clients traités, et mon sentiment est nettement plus positif que la réput largement distillée par ceux qui n’ont fait que voir l’homme qui a vu l’homme qu’a vu le doc.
Le gonzo conjuguant investigation journalistique et implication perso, coups de fil pour négocier un étalement de paiement, un emprunt à quelqu’un qui a les moyens et me préfère clean, reste plus qu’à retrouver mon passeport, ma brosse à dents, et un peu de Sub pour le voyage.
Tamie la francophone m’accueille à l’aéroport et me dépose dans le ventre de Tel Aviv. RdV le lendemain à 9 heures pour aller à Ashkelon, 7 bornes avant la bande de Gaza, pour un premier contact avec le Doc avant l’hospi, le surlendemain.
Fin prêt pour la croisière
Après avoir répondu en anglais aux questions et décliné mon CV d’usager (dont sans me vanter je n’ai pas à rougir), le docteur m’explique son procédé « simplissime et vieux comme l’anesthésie » : « N’importe quel anesthésiste utilise la plupart du temps des produits dérivés des opioïdes (rien de tel pour anesthésier !). Si au sortir de l’opération, ce même anesthésiste n’utilisait pas un bloqueur de récepteurs opiacés qui nettoie les récepteurs en se substituant aux molécules morphiniques, l’opéré resterait endormi puis dans le potage pendant des jours. »
C’est ce produit, qui bloque les récepteurs opioïdes après les anesthésies, qu’utilise le Dr Waismann pour nettoyer les récepteurs opioïdes des usagers d’opiacés. Une évidence biblique !
Le lendemain matin, en route dans la Golf de Tamie pour l’Ultra Rapid Detox (URD) dans la clinique où un lit m’attend. Staff d’experts hospitaliers au grand complet : une infirmière à mes petits soins, un anesthésiste qui m’envoie une poignée de cachetons pour me détendre et me mettre en condition, et le Dr Waismann à la manœuvre. À poil, une couche culotte XXXL que je savais pas que ça existait, une blouse jetable, et au pieu avec la télécommande et le docu animalier en hébreu, en attendant que les pilules agissent.
En début d’aprem, les experts redébarquent. Waismann me pose les patchs de l’électrocardiogramme, vérifie le tuyau d’intubation que l’on va me rentrer dans le gosier dès la sieste entamée (ça doit éviter de nettoyer le gerbi), l’infirmière vérifie les lanières qui me sangleront au lit histoire que je saute pas en route, l’anesthésiste me perfuse. Fin prêt pour la croisière…
Pourvu que ça dure !
Au réveil, j’ai un peu l’impression d’avoir fait tous les manèges de la fête foraine, très secoué mais radieux. Rhabillé, mes clics et mes clacs sous le bras, je prends la direction de l’hôtel de luxe sur la plage, à 2 pas de la clinique, que l’on a réservé pour moi et mes émotions… Le Doc exigeant que quelqu’un soit là pour accompagner le convalescent dans sa retraite, une amie Israélienne arrive de Tel Aviv. J’ai un peu le sentiment que je viens de naître et je n’en suis pas si mécontent. Un pas sur la balance, j’ai perdu 1,5 kg par rapport à la veille !!!
Le Dr Waismann me conseille d’aller me faire bichonner à l’hôtel et de me reposer pour me remettre de l’anesthésie, et me glisse 5 mg de Valium® et un potentialisteur de benzo pour m’aider à dormir. Salutations chaleureuses à tout le staff et direction l’hôtel plein d’étoiles, jacuzzi, hammam, rapide aller-retour en ville en fin d’aprèm pour un snack houmous de la mort. Derrière la fatigue, l’état particulièrement apaisé dans lequel je me trouve me rend dubitatif sur le fait d’être effectivement sevré. Je me tâte, je me guette à l’affût d’un des symptômes du manque : pas le moindre frisson, pas la moindre trace de sueur, pas la moindre torsion de boyaux, l’appétit est frugal mais là, l’esprit serein et léger…Pourvu que ça dure ! Le lendemain, je constate avoir éprouvé une légère suée dans la nuit, mais je me sens comme la veille, un peu moins fatigué, en pleine forme dans ma tête, stimulé aussi sans doute par la découverte du pays… Copieux p’tit déj dans la salle de l’hôtel complètement vide.
Protégé contre la tentation
Après le rot, Tamie nous emmène au premier débriefing dans le bureau de Magic Doc.
« Vous m’avez donné du mal, m’accueille-t-il. Une fois anesthésié, je vous ai injecté par doses successives de 25 mg la nettoyeuse naltrexone. À chaque dose, vos récepteurs mécontents ont entraîné une violente réaction de manque pendant laquelle vous en avez traversé tous les symptômes de manière sévère (vomissements, diarrhées, extrême sudation, convulsions qui sans les sangles éjectent du lit…). À la dernière injection, votre corps a cessé de faire le pop corn et de présenter les symptômes de sevrage des doses précédentes. J’ai pu en déduire que j’étais venu à bout de l’ensemble de vos récepteurs opiacés, et la dose totale utilisée m’a donné une estimation assez précise du volume global de vos récepteurs. Je suis aujourd’hui en mesure de vous prescrire un traitement neurobiologique visant à rééquilibrer cette disproportion entre le volume de vos récepteurs et votre production naturelle d’endorphine. J’ai déterminé le dosage quotidien du médicament qui va bloquer vos récepteurs opiacés, ce qui veut dire que si vous prenez des opiacés pendant ce traitement vous n’en ressentirez aucun des effets. Tant que vous prenez ce médicament, vous êtes protégé contre la tentation. Mais cet ange gardien a une autre fonction : il accélère le processus de réduction de la production de récepteurs opiacés par votre cerveau. Dans quelques mois, lorsque ce nombre de récepteurs sera revenu à un seuil plus naturel, vous pourrez stopper la prise de la molécule bloquante. Vous serez alors livré à votre libre arbitre, aurez le choix de décider si vous désirez continuer à vivre sans opiacés ou si vous désirez reprendre une consommation… Retournez vous reposer à l’hôtel, je reste à votre disposition pour vous rencontrer dès vous en ressentez le désir ou le besoin. »
Back to normality
De retour à l’hôtel, j’en mène pas large en Quicksilver, les pieds dans l’eau du lagon. Nous sommes en février, le 1er bain de l’été attendra, pas question d’ajouter un naufrage au sevrage !!! Merav et moi checkons out (ce qui réduira encore la note globale), direction Tel Aviv, non sans faire une dernière visite au docteur Waismann. Une dernière discussion au cours de laquelle il me rappelle que, tant que je suis son traitement de postcure, je suis protégé de l’effet des opiacé. Mon boulot désormais consiste à stimuler ma fonction endorphinique naturelle, en faisant tout ce que j’aime faire dans la vie : « Faites du sport, faites l’amour, masturbez-vous, écoutez de la musique, allez au cinéma, au théâtre… Évitez tous les stimuli qui vous rappellent la drogue, si vous avez besoin d’un psy allez en ville et pas dans un centre spécial drogués, etc. En un mot, back up to normality !!! »
À Tel-Aviv, séjour touristique dans un état de santé plutôt bon. Seules quelques sudations nocturnes me rappellent que je viens de décrocher de 3 g d’héroïne quotidiens. Elles stopperont progressivement au bout de 3 semaines…
Votre serviteur doit cependant confesser une assez nette compensation par l’alcool, surtout dans les premier temps, avec de très problématiques effets secondaires car le traitement neurologique qui bloque mes récepteurs donnent à cette consommation des effets un peu incontrôlables (perte de mémoire, déséquilibre…), qui s’aggravent sévèrement avec le cocktail alcool/cocaïne.
À la finale, quelques mois après le retour et un suivi à 80% du traitement à la naltrexone (quelques périodes de rupture d’appro et quelques oublis), je n’ai retouché qu’une seule fois au brown pour vérifier que je n’en ressentais pas les effets (sevré mais curieux, hé ! hé !). Ce que j’ai effectivement pu vérifier. Je dois reconnaître que je n’avais jamais traversé de sevrage aussi confortable physiquement et psychologiquement et de sortie de sevrage avec un moral aussi bon et une volonté aussi stable. Rien de particulièrement significatif n’est intervenu dans ma vie, ni en positif ni en négatif, qui aurait facilité ou mis à mal la démarche de ce sevrage. Encore 6 mois de naltrexone avant de retrouver ma liberté totale. Vous savez… l’excitante et dangereuse !!