Autosupport des usagers de drogues

Pour les pros

Pour les pros

Vous êtes professionnel·le de santé et vous vous posez des questions sur la prise en charge des usager·es ?

En tant que médecin ou pharmacien, vous n’avez pas besoin d’être spécialiste pour accueillir des usager·es. Il n’existe pas de réelle spécialité en addictologie.

La médecine de ville est habilitée à prescrire et délivrer la méthadone et le subutex. Comme pour les autres patient·es, nous conseillons d’être particulièrement vigilant·e sur la question du consentement et de la relation thérapeutique : assurez-vous que votre patient·e comprend bien le traitement que vous proposez, qu’il ou elle le choisit avec vous.

Ce sont des bonnes pratiques de déontologie médicale universelle, mais elles sont encore trop peu souvent appliquées dans le cas des usager·es de drogues.

Si vous êtes particulièrement sensible à la question des droits des usager·es, vous pouvez vous assurez que les professionnel·les et les usager·es de votre entourages connaissent leurs droits, en les affichant plubliquement ou en diffusant l’adresse de la plateforme des droits des usager·es.

Vous pouvez aussi faire part de manquements à ces droits à ASUD en écrivant à l’adresse odu@asud.org


Les addictions en pharmacie

Besoin d’un médicament ?

La pharmacie d’officine est votre premier interlocuteur.

De manière paradoxale, une catégorie de patients particulièrement sensibles à la fonction du médicament s’est longtemps trouvée mal à l’aise, voire carrément proscrite de l’espace de l’officine : le/la patient.e souffrant d’une addiction.

Ce temps est révolu.

Aujourd’hui les professionnnel.les de la pharmacie sont en mesure de proposer aux patients souffrant d’addictions toute une gamme de produits (médicamenteux ou non) qui changent radicalement l’image du pharmacien d’officine et celle du patient souffrant d’addiction.

Quelles solutions ?

Parmi les solutions à l’addiction, on peut compter celles qui visent à faire cesser ou à diminuer le comportement ou l’usage et celles qui consistent à diminuer les risques liés à la consommation.

Il existe des thérapies cognitives et comportementales, d’une part, et des solutions disponibles en pharmacie, d’autre part.

Pour aider à identifier la solution pharmaceutique appropriée, ce fascicule recense les principaux médicaments disponibles en pharmacie pour faire face aux consommations selon la stratégie établie.

Si vous avez besoin de renseignements supplémentaires, n’hésitez pas à demander à votre pharmacien.ne, ou à consulter les liens indiqués en dernière page.

Tabac

Envie de fumer moins ou d’arrêter ?

Plusieurs médicaments pour faire face à la dépendance et aux symptômes de manque : nervosité, insomnie, sueurs…

Traitements de Substitution à la Nicotine (TSN)

Même si les TSN sont disponibles sans ordonnance, on conseille de voir un médecin ou de discuter avec le/la pharmacien.ne des objectifs, effets attendus, dosages…

LES PATCHS/TIMBRES (NICOPATCHLIB, NICORETTE, NICOTINELL, NIQUITIN)

Le principe : la nicotine présente dans le patch traverse votre peau et entre peu à peu dans la circulation sanguine, sur des durées allant jusqu’à 24h. La nicotine passe très bien dans la circulation par la peau, ce qui explique la popularité des patchs.

LES FORMES ORALES (NICOPASS, NICORETTE, NICOTINELL, NIQUITIN)

Comprimé sous la langue ou chewing-gum (qui doit être maché plus lentement qu’un chewing-gum normal : la nicotine avalée en même temps que la salive ne passe pas dans le sang. En effet, le passage de la nicotine se fait en transmuqueuse et non par l’estomac).

Les comprimés ou chewing-gum peuvent être parfumés à la menthe, eucalyptus, fruits…

Traitements contre la dépendance physique au tabac

Dans le cas ou les TSN seraient insuffisantes ou inefficaces, ces médicaments peuvent vous aider à faire face aux symptômes de dépendance physique au tabac. Sur ordonnance.

— BUPROPION (ZYBAN®) —

Aide au sevrage. Utilisé à l’origine comme antidépressant, on a remarqué que ceux qui en prenaient avaient moins envie de fumer.

Remboursement : non remboursé

— VARÉNICLINE (CHAMPIX®) —

Médicament qui permet de soulager le manque et de réduire les effets de plaisir quand on fume.

Remboursement : remboursé en sevrage de deuxième intention.

Alcool

Si vous avez décidé de transformer vos modes de consommation parce qu’ils affectent votre santé, votre quotidien,ou vos relations, la pharmacie a des solutions pour vous aider à faire face tant à la dépendance et au manque (anxiété, agitation, irritabilité, insomnie, sueurs,cauchemars, tremblements, nausées…) qu’aux carences déjà provoquées par votre consommation.

Ces solutions pharmaceutiques peuvent s’ajouter à des solutions « psychologiques » : thérapies cognitives et comportementales, groupes d’entraides, accompagnement par un travailleur social.

— DISULFIRAM (ESPERAL®) —

Ce médicament de type « antabuse » vise à diminuer la dépendance à l’alcool en provoquant des effets indésirables (chaleur, nausée, vomissements) lors de la consommation. Dans la dychotomie de la carotte et du bâton, il s’agit bien du bâton. Remboursement : 65 %

— ACAMPROSATE (AOTAL®) —
— NALTREXONE (REVIA®) —

Bien que leurs principes actifs diffèrent, ces deux médicaments auraient pour objectif de vous aider à maintenir l’abstinence. La naltrexone agit aussi sur le système opiacé (antagoniste opiacé), mais on ne comprend pas encore bien son fonctionnement.

On sait seulement qu’elle peut aider à éviter de faire une rechute dans les périodes de sevrage, et qu’à cause de son fonctionnement opiacé, elle est formellement contre-indiquée quand on est sous TSO.
Remboursement : 65 %

— NALMÉFÈNE (SELINCRO®) —

Le nalméfène est un médicament – sous forme de comprimé à avaler entier (!) – qui agit lui aussi sur le système de récompense opiacé, et qui réduit la « sensation de plaisir » induite par la consommation d’alcool.

Ce médicament vous sera prescrit pour éviter les grosses consommations d’alcool si vous cherchez à réduire le risque lié à votre consommation en général.

On le prend donc « quand on sent qu’on en a besoin », c’est-à-dire à l’approche d’une soirée, au mieux 1 à 2 heures avant de commencer à consommer.

Remboursement : 30 % « Le Sélincro® est une sorte de SuperRevia : le Revia® bloque les récepteurs opioïdes mu tandis que le Selincro® bloque les mu et les kappa. Si je n’ai pas encore d’avis clinique sur le Selincro®, il y a déjà une révolution dans son positionnement : c’est le premier médicament disposant d’une AMM dans l’alcool qui permet au patient de choisir entre abstinence complète et consommation contrôlée. » (Journal d’ASUD)

— BACLOFÈNE (BACLOCUR®) —

À l’origine, le baclofène était utilisé pour le traitement de contractures musculaires, mais on a découvert assez récemment qu’il pouvait aider à diminuer le désir irrésistible de consommation.

Les patients chez qui le médicament est efficace décrivent un seuil à partir duquel ils deviennent « indifférents » à l’envie qu’ils avaient auparavant et qu’ils n’arrivaient pas à contrôler.

Ce seuil varie d’un patient à l’autre et c’est le patient qui dirige ses prises de médicament. Les médecins peuvent prescrire le baclofène pour un sevrage d’alcool dans le cas où les autres traitements n’auraient pas été efficaces.

Remboursement : 30 %
« Dans le syndrome de sevrage, toutes les cases sont cochées : d’abord, un effet antidépresseur… un effet myorelaxant qui annihile la pesanteur musculaire stratosphérique du sevrage. Enfin… la possibilité de continuer à s’alimenter du brouhaha des cafés… » (Journal d’ASUD)

Opiacés

Les opiacés, c’est beaucoup de choses : certaines légales sur prescription médicale (morphine, médicaments analgésiques opiacés comme le tramadol, codéine, oxycontin, skenan), d’autres pas (héroïne, morphine, opium).

Les traitements de substitution aux opioïdes, qui constituent la principale réponse pharmaceutique pour les addictions aux opioïdes, ont été autorisés et largement
rendus accessibles en France en 1995 (pour la méthadone) et 1996 (pour la buprénorphine).

Avec un accompagnement médical, psychologique et social, ils permettent de réduire ou d’arrêter
la consommation d’héroïne ou autres produits
opiacés et de diminuer les risques liés à leur consommation.

Attention : certains médicaments de substitution aux opioïdes (TSO) sont classés comme stupéfiants.

En donner, en vendre, ou en posséder sans ordonnance vous expose à des risques judiciaires.

— MÉTHADONE —

La méthadone se présente sous forme de sirop (obligatoire en primoprescription), puis sous forme de gélule après un an de traitement.

Elle doit être prescrite la première fois par un centre spécialisé en addictologie (CSAPA, ELSA), en milieu hospitalier ou en milieu pénitentiaire.

Après quelques mois, votre médecin peut vous orienter vers le médecin de ville pour renouveller la prescription.
Si la méthadone agit sur les mêmes récepteurs que les autres opiacés, certains effets comme l’euphorie se font moins ressentir.

Les doses prescrites sont théoriquement décidées en partenariat avec votre médecin selon votre situation et mode d’usage.

Le médecin doit faire mention de la pharmacie qui vous délivrera la méthadone, mais c’est à vous que revient le choix de la pharmacie. La méthadone interagit avec les autres médicaments/substances (notamment avec la buprénorphine et autres substitutions) : parlez-en à votre médecin.
Il peut y avoir des effets secondaires : baisse de libido, transpiration, prise de poids, problèmes buccodentaires…).

N’hésitez pas à en parler à votre médecin ou votre pharmacien, qui vous aideront à trouver des solutions.

Remboursée à 65%.

— BUPRÉNORPHINE (SUBUTEX®, OROBUPRE®, SUBOXONE® ET GÉNÉRIQUES) —

La buprénorphine est un médicament disponible sous forme de comprimé sublingual (Subutex®, Suboxone® et génériques), à faire fondre sous la langue pendant 10 à 15 mn ou sous forme de lyophilisat orodispersible (Orobupré®) soluble en 10 à 15 secondes.

La Buprénorphine Haut Dosage (nommée ainsi parce que la buprénorphine avait déjà été disponible auparavant à très bas dosage, le Temgesic®) est disponible à 0,4, 1, 2, 4, 6, ou 8 mg.

Elle peut être prescrite par le médecin de ville et elle est généralement plus répandue que la méthadone en France.

Les prescriptions peuvent être faites pour 28 jours, avec des délivrances toutes les
semaines en pharmacie.

En théorie, la buprénorphine ne présente pas de risque d’overdose (contrairement à la méthadone), sauf si elle est consommée avec d’autres substances comme l’alcool ou les benzodiazépines.

Remboursés à 65%

ARRÊTER LES PRODUITS DE SUBSTITUTION

En pratique rien ne vous empêche de continuer votre traitement aussi longtemps que vous en avez besoin.
Si vous décidez, pour des raisons qui vous appartiennent, de vous sevrer de votre traitement, parlez-en à votre médecin puis à votre pharmacien.ne.

Attention aux risques de rechute, notamment pour la méthadone, qui présente une période de sevrage plus longue que celle de l’héroïne.

Réduction des risques
La réduction des risques comprend toutes les stratégies qui visent à réduire les risques liés à la consommation, qu’elle soit addictive ou non.

Ici, nous recensons le matériel de réduction des risques que vous pourrez trouver en pharmacie.


Déposer plainte auprès de l’ordre des pharmaciens

Porter plainte a l’odre des médecins

En cas de non-respect de vos droits chez un pharmacien :

  • Vous devez d’abord protester verbalement au moment des faits, et faire part de votre intention d’en réferer à l’ordre des pharmaciens.
  • Vous devez ensuite adresser un courrier à la direction et/ou la comission de conciliation de votre caisse locale d’assurance maladie, en précisant les faits, et les droits qui n’ont pas été respectés.
  • Vous pouvez également envoyer un courrier recommandé au conseil départemental de l’Ordre du professionnel de santé.  ASUD met à disposition un modèle que vous trouverez ici Le conseil départemental est responsable de faire respecter le code de déontologie auquel sont soumis les pharmaciens, et de sanctionner s’il n’est pas respecté.
  • Si toutefois rien n’est fait, vous pouvez entrer en contact avec un groupe d’autosupport (tel qu’ASUD) pour qu’il vous mette en contact avec un conseil juridique.

En cas d’écriteau “le cabinet ne prescrit pas de X”

Dans certaines officines, on peut lire des écritaux du style : « la pharmacie ne délivre pas de… », eh bien de toutes sortes de produits utilisés par les usager·es pour leur traitement de substitution aux opiacés, comme le subutex ou la méthadone, même si l’usager·e a une prescription en bonne et due forme. Cette pratique, comme la non-délivrance de manière générale, est évidemment proscrite par l’ordre des pharmaciens. Effectivement, on peut lire dans le code de déontologie :

Sous-Section I Devoirs généraux Art. R. 4235-2

Le pharmacien exerce sa mission dans le respect de la vie et de la personne humaine. Il doit contribuer à l’information et à l’éducation du public en matière sanitaire et sociale. Il contribue notamment à la lutte contre la toxicomanie, les maladies sexuellement transmissibles et le dopage.

Art. R. 4235-6 Le pharmacien doit faire preuve du même dévouement envers toutes les personnes qui ont recours à son art.

Dans ce cas, il est possible de saisir le conseil de l’ordre des pharmaciens sur la base d’un argumentaire lié à la déontologie et au code de santé publique. Si vous voyez un écriteau de ce type :

  1. Prenez l’écriteau en photo. Notez la date, le lieu, l’horaire.
  2. Envoyez la photo et ces informations à ASUD (odu@asud.org)
  3. Déposez une plainte en votre nom (ASUD n’est pas habilité à déposer de plainte, même en tant qu’association agréée) auprès du conseil départemental de l’ordre des pharmaciens du département où est située l’officine, en utilisant si nécessaire le modèle de lettre disponible sur la plateforme de l’ODU (LIEN AVEC LA LETTRE TYPE).
  4. Partagez les étapes de votre démarche avec ASUD.