« Quant aux vieux forcenés de la cigarette, personne ne peut rien pour eux (…) ils étaient nés pour une passion de cendre. »
Louis Lewin, Phantastica
Le tabac est bien une drogue, la preuve : j’aime ça ! Bizarrement, j’éprouve plus de difficulté à écrire sur le tabac que sur l’héroïne ou le cannabis. Pourtant, la cigarette, je connais. C’est même la première drogue que j’ai consommée sans jamais avoir l’impression de consommer une drogue. Bien sûr, comme tout fumeur, il m’est arrivé de faire des kilomètres à la recherche d’un tabac et même, dans les moments de pure disette, de ramasser mes vieux mégots pour m’en rouler une. Bref, j’ai toujours vu la cigarette comme une habitude, certes tenace mais pas plus, tout en sachant que son usage réduirait sans doute ma durée de vie. Mais à cette époque, je m’en foutais royalement. Et puis les années passent, on tient plus à la vie, et on commence à percevoir les effets pervers de la clope−: manque de souffle, toux chronique, et très grosses difficultés pour ceux qui souhaitent arrêter. La clope accompagnée d’un bon café (ou vice versa), la clope d’après shoot, la clope après l’amour, sans doute la plus délicieuse… Si tant de gens fument, c’est bien qu’ils y trouvent quelque chose-!
L’histoire du tabac, des shamans aux buralistes
Le tabac, nicotiona en latin, est une plante annuelle de la famille des solanacées, originaire d’Amérique du Sud, utilisée depuis la nuit des temps par les amérindiens (et en Océanie) comme une plante sacré aux vertus médicinales. Fumé, prisé ou ingéré le tabac était associé à la plupart des rituels, souvent avec de la datura (une autre solanacée) et d’autres plantes hallucinogènes si communes dans cette partie du monde. Les cendres de tabac étaient utilisées comme engrais et comme insecticide Le tabac avait même son Dieu: Centzon Totochin à qui il était de bon ton d’offrir quelques sacrifices humains. Mais le tabac alors utilisé surtout par les shamans n’as pas grand chose à voir avec les produits dérivés commercialisés aujourd’hui. Il était utilisé brut, et pouvait provoquer des effets puissants pouvant mener jusqu’à la transe.
C’est avec la découverte des Amériques en en 1492 que l’Europe, puis le reste du monde découvre cette plante fascinante parfois considérée comme diabolique. Voir un homme recracher de la fumée par le nez était absolument stupéfiant, et cela ne pouvait être que l’œuvre du Malin. Alors un peu partout dans le monde on essaie de prohiber le tabac de façon plus ou moins brutale: en Russie on coupe le nez des priseurs et les lèvres des fumeurs, quant aux récidivistes on leur coupe la tête. Le pape lui excommunie les fumeurs, des moines surpris à fumer sont même emmurés vivant, les anglais décapitent l’inventeur de la pipe et en Orient les amateurs de tabac sont pendus, une pipe en travers du nez , brulés sur un bucher de plants de tabac, ou alors on leur couler dans la gorge du plomb en fusion…
Mais tout ces châtiments n’empêcheront « l’ivrognerie sèche » de se développer, alors peu à peu on taxera ce que l’on ne peut interdire et en France un monopole de la vente du tabac au profit du roi est instauré. A la révolution la liberté de culture et de vente est instaurée mais Napoléon rétablira peu après le monopole…et les taxes. En 1809 un chimiste français. Nicolas Vauquelin, isole la nicotine, principal alcaloïde du tabac. Il faudra attendre le milieu du XIX siècle pour voir apparaitre les premières cigarettes.
En France ce sont les « Élégantes » et les « Hongroises », qui deviendront « Gauloises » et « Gitanes ». Dès 1859 un ouvrage publié par la Faculté de médecine de Montpellier décrit « les ravages du tabac » et dix ans plus tard apparait la première association anti-tabac. Un des premier pays a lutter farouchement contre le tabac fut l’Allemagne, malheureusement il s’agissait d’un diktat nazi, ceux ci considérant que le tabac dénaturait la race *mettre affiche allemande.Et puis ni Hitler, ni Mussolini, ni Franco n’étaient fumeurs contrairement à Churchill, Roosevelt et Staline. A cette époque la liberté était du coté des fumeurs. La cigarette va régner sans entraves jusqu’en 1975, date à laquelle Simone Veil alors Ministre de la Santé, dénonce la nocivité du tabac et impose courageusement une loi restreignant la publicité pour le tabac.
Depuis cette date la consommation baisse et l’usage et la vente de tabac sont de plus en plus réglementés. Les prix sont en hausse constante alors que taux de nicotine et de goudrons sont de plus en plus limités (mais pas les additifs!). Oubliées les P4 et autres Celtiques (*mettre pub celtique) qui vous arrachaient les poumons, même la fameuse Gitane, si chère à Gainsbourg, a du rentrer dans le rang pour éviter la disparition pure et simple. Aux USA, le scandale fait rage: les cyniques stratégies commerciales des cigarettiers sont enfin dénoncées, ainsi que les manipulations chimiques qu’ils font subir à leurs produits afin d’en renforcer le pouvoir addictif, au mépris des considérations de santé publique. Des vulgaires fabricants de dope, mais qui bossent dans la légalité. Pour éviter les procès que leurs intentent des fumeurs malades ou leur famille, le cartel du tabac paye à l’état une somme colossale lui garantissant désormais l’immunité. Les vendeurs de tabac se tournent désormais vers des nouveaux marchés prometteurs: les pays en voie de développement et le tiers monde. La Chine, pays qui passe par les armes les revendeurs de drogues, est le nouvel eldorado de la sainte clope: ……millions de chinois fument.
Une plante en voie de prohibition
Après avoir été un symbole de modernité, de virilité, le cigarette de tabac est désormais montrée du doigt comme source de malheur et de décadence. A l’heure ou certains pays dépénalisent le cannabis, le tabac lui semble être en route pour une prohibition. Et pour soutenir cette terrible accusation , et comme à chaque fois que l’on parle d’une drogue, on dérape dans l’irrationnel transformant de facto l’information en propagande tout en n’oubliant pas de taper au porte monnaie les consommateurs de tabac (dont 40% sont des chômeurs, selon l’OFDT) . Il n’est pas question de nier les dégâts que peuvent provoquer l’abus de tabac mais n’est-il donc pas possible de réfléchir aussi à comment mieux consommer le tabac, comment réduire les risques liés à son abus? Est-ce le tabac lui-même qui est dangereux ou les manipulations chimiques que les industriels du tabac font subir à cette plante? Le vrai scandale du tabac ne tiendrait-il pas plutôt à sa commercialisation et ses puissants moyens de publicité, et à ce que les gouvernements aient laissé les fabricants de cigarettes manipuler leurs produits afin d’en renforcer entre autres leur effet addictif. Il semble quand même que l’ampleur de cette croisade anti-tabac dépasse largement les nuisances de la fumée.
Après le puissant lobby des cigarettiers voici venir l’avènement des docteurs es tabac, des patcheurs à tout va, des vendeurs de clopes à la laitue ou d’herbe de perlimpinpin, la lutte contre le fléau est sacrée et tout est permis, même gagner beaucoup d’argent. Après tout industriels de tabac et laboratoires ont au moins un point commun: ils gagnent énormément d’argent en fourguant des drogues … Alors chers fumeurs, êtes vous donc tous condamnés à périr dans d’atroces souffrances ?