Autosupport des usagers de drogues

Vive la drogue, nom de Dieu !

Vive la drogue, nom de Dieu !

Oui c’est vrai, on aime ça. C’est du reste un peu pour cette raison qu’on en a pris, qu’on en prend et qu’on en prendra. Oui, nous sommes des fétichistes du matin glauque où la paupière est lourde et la langue chargée des turpitudes de la veille. Oui, nous appartenons à cette race de chacals (que soit mille fois maudit le jour où leur mère les a conçus) qui voient la modification de conscience comme un continent inexploré, un dieu primitif aux exigences bornées et au pouvoir thaumaturge. Voilà, c’est dit. C’est bon de soulager sa conscience.

Maintenant, s’agit-il vraiment d’un scoop ? Depuis sa créa­tion, Asud est le journal des gens qui en prennent. Notre slogan des années 2000, « le journal des drogués heureux », est une provocation au 180e degré, pas une profession de foi. En fait, comme tous les acteurs de la réduction des risques, nous nous cachons derrière notre petit doigt sanitaire. On nous accuse d’être prosélytes, on répond « sida » et on murmure « hépatite ». Mais ça, c’était avant.

C’était avant que la substitution, le matériel stérile, les conseils pour shooter à moindres risques, bref la politique défendue depuis le premier jour dans ce journal, ne permettent de sortir les drogués des statistiques du sida. Pourtant, si l’on se réfère aux attendus de la loi de 2004 qui légalise la réduction des risques, la menace virale reste la justification officielle. Un changement de cap qui autorise par exemple les usagers à venir piquer du zen dans un Caarud.

Alors, c’est quoi le sujet ? Le sujet, c’est l’ivresse posée comme un problème et non comme la solution qu’elle est de fait pour la plupart d’entre nous. Et là, on diverge. Et gravement. Autant il est vain d’être pour ou contre la drogue (on n’est pas pour ou contre les chaussons ou la saucisse), autant l’ivresse présentée comme une valeur qui honore la condition humaine est une cause qui mérite d’être défendue. Sommes-nous prêts à mou­rir pour cette cause ? Non, justement pas. Nous pensons au contraire que l’ivresse est une valeur de vie, pas de mort. Ne balayez pas cet argument, nous disons tout haut ce que beau­coup de gens pensent tout bas (et vive la marine !). L’ivresse est un état recherché depuis toujours pour explorer les chemins les plus chaotiques de l’existence et nous défendons TOUTES LES IVRESSES, les grandes, les petites, les vulgaires, les raco­leuses, les licites, les illicites, toutes. L’ivresse est un état qui honore l’être humain, une révolte contre la fatalité. L’ivresse est à l’origine de milliers de bonnes actions, de gestes d’ami­tié, de partages, de mots d’amour, de rires surtout. Supprimez l’ivresse, ne serait-ce qu’un instant, vous entendrez un silence étrange, celui qui sert dans l’expression « silence de mort ». Oui, je sais que ce n’est pas bien d’écrire des choses pareilles. Nous sommes l’association des gens qui en prennent, mais nous n’avons pas le droit de dire qu’en prendre, la plupart du temps, ça nous fait rire.

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