Le docteur Patrick de la La Selle, s’est vu interdire d’exercer pendant un an (dont six mois avec sursis) par le conseil de l’ordre des médecins : l’une de ses patientes, qui désirait réduire son traitement, lui a ramené des fioles de méthadones (19 pour 675ml). Partant le soir même en vacances, il les a déposé dans un tiroir fermé à clef de son cabinet. Ses associés, en conflit avec lui à cause de sa clientèle d’exclus, ont mis la main dessus et se sont empressées de les apporter au conseil de l’ordre des médecins qui a fait derechef un signalement au parquet pour « trafic de méthadone ».
Aujourd’hui, la DASS a émis un avis favorable n’estimant pas nécessaire des poursuites, la Sécurité Sociale, après une enquête poussée de l’activité du médecin, n’a pas donné suite, et la Brigade des stupéfiants a classé l’affaire. Mais la DRASS a émis un rapport à charge que le Conseil de l’Ordre a repris à son compte en portant plainte pour « détention illégale de substances classées comme stupéfiants » et « prescription dangereuse »
Le Conseil Régional de l’Ordre, saisi de cette plainte, a statué en première instance et a décidé d’interdire au Docteur de La Selle, l’exercice de la médecine pendant un an. !! Mais il est bien sur en appel au Conseil National de l’Ordre des Médecins.
Outre la mise en cause ridicule de cet acte que tout médecin pourrait être amener à faire, il nous semble important de dénoncer cette chasse aux sorcières et de démasquer les mécanismes mis en place :
Tout d’abord, au niveau local, n’oublions pas que Montpellier est la seule ville de France ayant connu une expérience de « salle de shoot », initiée par Asud en 1994 et vite vouée aux gémonies. Depuis cette époque, le fossé ne cesse de s’élargir entre partisans et adversaires de la réductions des risques. Plus récemment, c’est Marie-Ange Augé-Caumon, pharmacienne très impliqué dans la réduction des risques qui a fait les frais de la malveillance de son ordre professionnel. L’existence d’une nombreuse population d’exclus, de « travellers » amateurs d’opiacés et clients potentiels du marché noir contribue à radicaliser les positions : d’un coté deux CSST, très frileux avec seulement une quarantaine de patients chacun , de l’autre, un petit réseau de médecins de ville très impliqués qui suivent 3500 usagers dont ce médecin dynamique qui gère une file active de 200 usagers à lui tout seul, faute de réponse satisfaisante au niveau local.
Ensuite, au niveau national, le docteur De la Selle est l’ancien Président de la Coordination Nationale des réseaux ville-hôpital. C’est aussi une figure dans le milieu de la réduction des risques. En attaquant ce symbole, le conseil de l’ordre envoie un message fort aux autres médecins : « si nous pouvons nous en prendre à lui, nous pouvons aussi nous en prendre à vous ».
C’est un énième pas en arrière pour la libéralisation de la prescription de méthadone en médecine de ville. Combien de médecins, après cette épisode, voudront rendre service à leur patient ? Encore plus grave, combien voudront prescrire de la méthadone ? Un comité de soutien est en cours de constitution.
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