Sommaire par certains aspects, le testing reste une technique d’analyse simple, rapide et peu coûteuse. C’est aussi la seule qui peut être réalisée directement par les consommateurs. Les sites vendant ces réactifs fleurissent donc sur la toile, oubliant généralement d’en rappeler les limites…
Concrètement, le principe du testing est simple : déposer une goutte d’un réactif liquide sur un échantillon de produit et observer la réaction chimique qui se produit. Les changements de couleur du réactif sont ensuite interprétés à l’aide d’une grille de comparaison fournie avec le réactif. L’opération peut être répétée avec d’autres réactifs pour affiner les résultats. Mais attention à ne pas gober le marketing des vendeurs de tests : le testing a ses limites…
UNE FAUSSE IMPRESSION DE SÉCURITÉ
Prenons le réactif le plus connu, le « Marquis ». À son contact, la MDMA réagit en bleu-noir, mais une réaction bleu-noir ne garantit pas qu’il s’agisse de MDMA : peut-être qu’un autre produit (ou mélange de produits) contenu dans votre échantillon réagit lui aussi en bleu-noir… C’est le risque de faux positif et on pensait jusqu’à il y a peu que c’était le seul risque d’erreur du testing. Pour reprendre l’exemple du Marquis, en cas de réaction autre que bleu-noir, on pensait pouvoir garantir l’absence de MDMA. On pensait donc possible d’utiliser le testing pour rechercher des produits de coupe dangereux (comme la PMA dans les ecstasies, par exemple) et garantir leur absence. Malheureusement, la Global Drug Survey (1) a démontré (en 2014) l’existence d’un risque de faux négatif. Le testing est donc une technique présomptive* qui peut permettre de reconnaître certaines arnaques lorsque la réaction n’est pas celle attendue mais qui, en cas de réaction conforme, ne donne finalement que peu d’informations. Pire, il risquerait d’induire une fausse impression de sécurité chez les consommateurs. C’est du moins l’argument développé par l’Inserm dans un rapport d’expertise de 1998 (rapidement accusé de faire « totalement abstraction de l’ensemble des mesures de prévention qui entourent habituellement le testing » (2) ) qui conduisit à l’interdiction des réactifs colorimétriques pour les associations en 2004, via le décret entourant la RdR.
Ils demeurèrent cependant autorisés pour les particuliers, et plusieurs sites ayant pignon sur rue vendent des réactifs au public. En France, c’est notamment le cas de la société NarcoCheck, spécialisée dans les tests de dépistage (pas forcément volontaires…) qui vend aussi des réactifs pour « tests sur substances solides » dont certains semblent adressés aux consommateurs, comme celui censé « identifier les produits de coupe dangereux pour la santé contenus dans la cocaïne » avec une très grande fiabilité. Sauf que si l’on regarde de plus près la grille de comparaison, on se rend compte que la lidocaïne est censée réagir en jaune orangé tandis que le lévamisole réagit en vert foncé. Quid d’une cocaïne contenant ces deux produits de coupe (ce qui n’aurait rien d’original) ? C’est l’un des inconvénients du testing : la technique est non-séparative*, elle donne au contraire un résultat global, ce qui complique l’analyse de drogues puisque ces dernières sont presque toujours des mélanges de plusieurs composants.
La palette de réactifs s’est toutefois largement développée, avec désormais une quinzaine de réactifs (dont certains semi-quantitatifs). En croisant ces différents tests, on peut affiner les résultats et gagner en précision. Bien utilisés, les réactifs colorimétriques permettent donc de réduire les risques en éliminant certaines arnaques qui auront produit une réaction non-conforme à celle attendue. C’est aussi une technique simple et rapide, et c’est à l’heure actuelle la seule technique d’analyse pouvant être réalisée par les consommateurs eux-mêmes. Bref, une bonne technique, rapide, simple, amusante à réaliser, pas trop chère et utile, à condition de bien en comprendre les limites et de ne pas prendre les résultats obtenus pour parole d’Évangile.
Références
1) https://www.globaldrugsurvey.com/
2) Une fausse sécurité pour l’Inserm, I. Gremy, Swaps n°15.